Chaque année, plus de 18 millions de tonnes d’engrais minéraux sont utilisés en Europe. Les engrais les plus importés sont à base d’azote (29%), de phosphore (58%) et de potassium (78%).
Par exemple, la France importe tous ses engrais : l'azote provient principalement des pays de l'OPEP, et quant au phosphore, une majorité provient du Maroc, qui détient 80 % des réserves.
Riche en azote, phosphore et potassium, l'urine humaine serait donc la clé pour développer des solutions bio agricoles abordables.
Convaincue alors des bienfaits de cette ressource inépuisable, Toopi Organics, jeune entreprise girondine fondée par Michael Roes et son associé Pierre Huguier, s'est lancée dans l'aventure en 2019 dans le recyclage et la valorisation des urines en biofertilisant agricole et produits bactériens pour l’industrie.
Quelques années plus tard, la startup est en phase d'industrialisation de ses solutions et a ouvert début juin 2022 sa première usine à Loupiac-de-la-Réole près de Bordeaux.
Outre la démarche d'une économie circulaire au profit d'une agriculture plus responsable, le projet vise également à promouvoir une gestion durable des ressources en eau, contaminées par les urines.
"Chaque année en Europe, 6000 milliards de litres d'eau potable sont contaminés par 200 milliards de litres d'urine", a déclaré la société.
Toopi Organics collecte, traite et recycle l'urine humaine. Pour la collecter la société a installé des toilettes séparatives sans eau pour homme et femme dans les locaux recevant du public, les aires d'autoroutes, les écoles, les festivals etc., puis utilise un procédé low-tech breveté qui ne génère aucun déchet pour assainir l'urine.
Les urines collectées par l'entreprise sont filtrées en amont pour éliminer tous les macro-déchets : poussières, cheveux, etc.
Du sucre est ajouté dans ce milieu naturellement riche en azote. La température et le pH sont quant à elle adaptés.
Ensuite, des bactéries aux rôles bien spécifiques sont ajoutées afin de se multiplier. Certaines permettent aux plantes de capter plus facilement le phosphore du sol ou l'azote atmosphérique sans avoir recours aux engrais chimiques. D'autres peuvent agir comme insecticides, pesticides ou fongicides.
Un litre d'urine produit un litre de ces biostimulants, qui n'apportent pas directement de minéraux aux plantes comme le font les engrais, mais aident les plantes à se fertiliser en améliorant leurs capacités.
Outre l’apport fertilisant qu’elle procure aux sols, l’urine est un excellent milieu de culture pour les micro-organismes.
L’urine est ainsi transformée en une gamme de produits destinée aux agriculteurs mais aussi à d’autres industries.
Leur première usine de production industrielle d’urine humaine située près de Bordeaux, en France, est capable de traiter 250.000 litres d’urine par an.
« Notre innovation s’inscrit dans un modèle circulaire, local et reproductible ; notre processus de recyclage de l’urine est économe en énergie, en ressources et ne produit AUCUN déchet. Toutes les activités (collecte, transformation, utilisation) sont situées dans un rayon de 150 km. L’urine est collectée dans les zones urbaines et les bioproduits sont distribués dans les zones rurales » précise Michael Roes.
L’urine se propose désormais comme une alternative naturelle, plus performante et moins coûteuse pour les agriculteurs !
Dans les cinq prochaines années Toopi Organics vise à installer de nouvelles unités de valorisation des urines dans une vingtaine de métropoles françaises.